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Votre commission se propose aujourd’hui de vous rendre compte de ces expériences fon-
damentales, et de la manière dont le citoyen Volta les a fait servir à l’établissement de sa théorie.
Elle doit beaucoup de remerciemens à ce savant pour la complaisance qu’il a eue de les répéter
plusieurs fois devant les commissaires, qui en ont ainsi constaté par eux-mêmes la vérité et
l’exactitude.

Le fait principal, celui dont tous les autres dérivent, est le suivant:
Si deux métaux différens, isolés, et n’ayant que leur quantité d’électricité naturelle, sont
mis en contact, on les retire du contact dans des états électriques différens; l’un est positif,
et l’autre est négatif.

Cette différence, très-petite à chaque contact, étant successivement accumulée dans un
condensateur électrique, devient assez forte pour faire écarter très-sensiblement l’électromètre.
L’action ne s’exerce point à distance, mais seulement au contact des différens métaux: elle
subsiste aussi long-temps que le contact dure; mais son intensité n’est pas la même pour tous.
Il nous suffira de prendre pour exemple le cuivre et le zinc. Dans leur contact mutuel,
c’est le cuivre qui devient négatif, et le zinc devient positif.

Après avoir prouvé le développement de l’électricité métallique, indépendamment de
tout conducteur humide, le citoyen Volta introduit ces conducteurs.

Si l’on forme une lame métallique avec deux morceaux, l’un de zinc, l’autre de cuivre,
soudés bout à bout, que l’on prenne entre les doigts l’extrémité de la lame, qui est de zinc,
et que l’on touche avec l’autre extrémité, qui est de cuivre, le plateau superieur du conden-
sateur, qui est aussi de cuivre, celui-ci se charge négativement. Celà est évident d’après l’ex-
périence précédente.

Si, au contraire on tient entre les doigts l’extrémité cuivre, et que l’on touche avec
l’autre extrémité, qui est zinc, le plateau supérieur du condensateur, qui est de cuivre; lors-
qu’on détruit le contact et qu’on enlève le plateau supérieur, il n’a point acquis d’électri-
cité, quoique le plateau inférieur communique avec le réservoir commun.

Mais si on place entre le plateau supérieur et l’extrémité zinc un papier imbibê d’eau
pure, ont tout autre conducteur humide, le condensateur se charge d’éléctricité positive.
Il se charge encore, mais négativement, lorsque l’on touche avec l’extrémité cuivre le plateau
recouvert par le conducteur humide, en tenant entre les doigts l’extrémité zinc. Ces faits sont
incontestables; ils ont été vérifiés par la commission.

Voici comment le citoyen Volta les explique et les rapporte au précédent.

Les métaux, dit-il, et probablement tous les corps de la nature exercent, comme on vient
de le voir, une action réciproque sur leurs électricités respectives au moment du contact. Lorsque
l’on tient la lame métallique par son extrémité cuivre, une partie de son fluide électrique passe
dans la lame opposée, qui est de zinc; mais si ce zinc est en contact immédiat avec le conden-
sateur, qui est aussi de cuivre, celui-ci tend à se décharger de son fluide avec une force égale,
et le zinc ne peut rien lui transmettre: il doit donc se trouver, après le contact, dans l’état
naturel. Si, au contraire, on place un papier mouillé entre le zinc de la lame et le plateau de
cuivre du condensateur, la propriété motrice de l’électricité, qui ne subsiste qu’au contact,
est détruite entre ces métaux; l’eau, qui paroit jouir à un degré très-foible de cotte propriété
par rapport aux substances métalliques, n’arrête que tres-peu la transmission du fluide du zinc
au condensateur, et celui-ci peut se charger positivement.

Enfin, lorsque l’on touche le condensateur avec l’extrémité de la lame qui est cuivre,
le papier humide interposé, et dont l’action propre est très-foible, n’empêche pas les plateau
métallique de faire passer une partie de son électricité positive dans la lame de zinc; alors,
en détruisant le contact, le condensateur se trouve chargé négativement.

Il est facile d’après cette théorie, d’expliquer la pile du citoyen Volta. Pour le faire avec
plus de simplicité, supposons qu’on la forme sur un isoloir, et représentons par l’unité l’excès