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ces muscles sont pourvus, ont un tout autre employ.On comprendroit alors
bien pourquoi le fluide électrique, qui dans les expériences dont il s’agit ne fait
que stimuler un peu les nerfs, n’occasionne point dans de semblables muscles
destitués de mouvement volontaire les contractions et les secousses qu’il
occasionne dans les autres sujets à la volonté.

Mais que dirons-nous s’il y a des animaux, dont toutes les parties se re-
fusent aux mouvements qu’on penseroit y exciter par les artifices indiqués
quelque susceptibles qu’elles soient d’ailleurs de mouvements spontanés?
J’ai rencontré plusieurs de ces animaux rebelles, pour ainsi dire, dans la classe
des vers, comme les sangsües, les limaces et limaçons, les vers de terre, et
autres, sur lesquels ayant fait les preuves de toutes les manieres possibles,
je n’ai pu rien obtenir. Je dirai plus: ils ont tenu contre des decharges d’électri-
cité artificielle assez fortes pour étinceller, et capables de me donner une com-
motion sensible dans les bras; il ne s’est point excité dans ces petits animaux
de mouvement remarquable en aucune partie de leur corps; ils ont paru en
être aucunement affectés: ce qui m’a beaucoup étonné. Seroit-ce faute des
nerfs? Mais peut-on dire que ces animaux en manquent? Non surement et
les limaces surtout en sont richement pourvües. Mais vraisemblablement l’of-
fice de ces nerfs n’est pas d’induire le mouvement dans les parties, et ces
mouvements quoique spontanés s’exercent par un tout autre méchanisme
comme les non spontanés dans les autres animaux. Il y a des vers en effet
aquatiques et terrestres, dans lesquels on a découvert et decrit le veritable
mechanisme de plusieurs mouvements. Quoiqu’il en soit voila une difference
essentielle dans l’économie animale entre ceux-ci et les autres animaux.

Mais si plusieurs vers se refusent, comme on vient de voir, à nos épreuves,
je ne me hâterai pas de conclure qu’il en soit de même de tous les vers en ge-
neral, et encore moins de tous les insectes; au contraire je dois dire, que j’ai
réussi très bien sur plusieurs de ces derniers, comme ecrevisses, scarabes, sau-
terelles, papillons, et jusques sur les mouches. Voila une des manieres par
lesquelles j’obtiens plus surement l’effet dans ces animaux difficiles à assujettir
aux expériences ou par leur petitesse ou par les écailles dont ils sont recouverts.
Après avoir tranché la tête à la mouche, au papillon, au scarabe etc., je leur
fend tout au long le corselet avec un canif ou des fines ciseaux, et j’introduis
profondément dans la fente près du cou un morceau de feuille d’étain, ou de
papier argenté, qui est proprement un papier couvert de feuille d’étain et un
peu au dessous j’introduis de même bien dans l’interieur le tranchant d’une
lame d’argent, p. e. une petite monnoye: alors faisant avancer celle-ci jusqu’au
contact de la feuille d’étain, voila les antennes et les jambes se plier, se debattre
et le tronc même s’agiter ecc.

Je viens maintenant [1] aux expériences, que j’ai faites sur ma langue et
sur d’autres et qui m’ont présentés des phénomenes nouveaux aussi curieux