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unes de ces expériences sur l’Anguille tremblante: il avoit fait voir que la commotion
ne se propageoit que par les bons conducteurs de l’électricité, et étoit
absolument arrêtée par les corps isolants; qu’une chaîne de personnes se donnant
la main et faisant circuit étoient frappées à l’instant ec.: le tout enfin
comme avec une bouteille de Leyde. Mr. Walsh de son coté faisoit les mêmes
expériences, et les poussoit beaucoup plus loin: il nous démontra comment
le ventre et le dos de la Torpille, le museau et la queue de l’Anguille tremblante
font fonction des deux surfaces de la bouteille de Leyde. Il nous fit voir que
la plus petite interruption dans la chaîne des conducteurs arrête cette décharge
électrique, et empêche par-là, qu’on puisse jamais obtenir d’étincelle; et voici
l’explication qu’il en donne:

( ) Voyant que tout cela a lieu de même dans la décharge d’une Batterie
électrique très-grande, mais très-foiblement chargée, qui ne laisse pas de
donner une forte commotion, mais seulement par un contact immédiat, et
sans étincelle sensible, il juge conséquemment que la Torpille décharge une
très-grande quantité de fluide électrique, de même qu’une telle batterie, mais
avec peu d’énergie, avec une faible tension (selon ma maniere d’expliquer);
de sorte que ni l’une ni l’autre de ces décharges, qui d’ailleurs se ressemblent
en tout point, ne peut franchir la moindre interruption.

( ) Mr. Walsh trouvant que l’Anguille tremblante donne une secousse
beaucoup plus violente que la Torpille, jugea que celle-là pouvoit non seulement
décharger une très-grande quantité de fluide électrique, mais aussi
le lancer avec plus d’énergie: il compara l’Anguille à la même batterie électrique
chargée à un degré de force (ou de tension selon moi) plus perceptible:
aussitôt il conçut l’espérance d’en obténir une étincelle; ce qui lui réussit
très-bien: voilà, comme il fit l’expérience.

( ) Il coupa transversalement avec un canif une feuille de métal
collée sur une lame de verre, de sorte qu’il y eût la plus petite solution de continuité
possible; et mit cette feuille dans le circuit: à l’instant qu’on toucha
avec un bout de l’arc conducteur la tête de l’Anguille l’autre bout communiquant
avec la queue, l’étincelle eclata à l’endroit marqué par la dite interruption
de la feuille métallique.

( ) Il est bien étonnant qu’un animal puisse mouvoir à son gré le
fluide électrique, le condenser dans une partie de son corps, le raréfier dans
l’autre, et le lancer enfin à travers des conducteurs, qui, si l’animal est dans
l’air, doivent former le circuit, et le ramener par à l’equilibre. Il l’est encore
plus que cette charge et décharge puisse s’opérer dans l’eau, qui est un conducteur
elle-même, et que le courant électrique attrappe justement le bras
de l’homme plongé pour le toucher, ou un autre poisson qui nage auprès de
lui (qui est frappé de maniere à ne pouvoir plus se soustraire à la gueule dévorante
de l’animal électrique).